/, Ethnologie, Histoire, Mythologie, Sciences humaines/Mexica. Templo Mayor. Ecoumène. Entre Vie et Mort, entre monde souterrain et monde céleste.

Mexica. Templo Mayor. Ecoumène. Entre Vie et Mort, entre monde souterrain et monde céleste.

By | 2024-06-22T12:25:40+02:00 14 juin 2024|Art, Ethnologie, Histoire, Mythologie, Sciences humaines|1 Comment

Thème du tiers inclus : L’écoumène, les offrandes

Antagonismes en interaction : Entre Vie et Mort, entre monde souterrain et monde céleste.

 

Mexica

 

Des dons et des dieux

au

Templo Mayor

 

Le Templo Mayor de Tenochtitlan, comme beaucoup de pyramides mésoaméricaines, était une masse solide de pierre, de terre, de chaux, de sable et de bois. Il était constitué d’une plate-forme quadrangulaire de 78 mètres sur 84 mètres, sur laquelle se dressait une pyramide de 45 mètres de haut, constituée de quatre corps en escalier. Ces derniers servaient de base à deux chapelles :  celle du sud, dédiée à Huitzilopochtli, le dieu du soleil et de la guerre, et celle du nord, consacrée au culte de Tlaloc, dieu de la pluie.

 

 

On accédait aux chapelles par un double escalier situé sur la façade ouest de la pyramide, flanquée de grandes têtes de serpent de basalte. Le Templo Mayor a fait l’objet de rénovations constantes depuis son édification au 14ème siècle jusqu’à sa destruction au 16ème siècle. Ceci est démontré par la découverte d’au moins sept extensions de l’édifice.

 

Dalle commémorant l’inauguration du Templo Mayor

 

Le Templo Mayor évoque la Montagne sacrée de la vision Mexica du monde et, en particulier, la mythique Coatepeti (« colline des serpents »), où le dieu solaire Huitzilopochtli vainquit ses frères et sa sœur, la déesse de la lune Coyolxauhqui et les stellaires Centzonhuitznahuah.

La double structure du Templo Mayor est conforme à la vision méso-américaine de l’univers, à la classification par oppositions binaires : Saison sèche / Saison des pluies ;  Jour / nuit ;  Feu / Eau ; Chaud / Froid ;  Ocre / Bleu, etc.

 

Les offrandes du Templo Mayor

L’emplacement des dépôts rituels à l’intérieur des édifices religieux de l’enceinte sacrée dépendait du moment où se déroulait le rite de dons.

Ainsi, les offrandes de construction étaient placées directement sur les fondations ou à l’intérieur du noyau architectural.

Les offrandes d’inauguration étaient déposées à l’intérieur de réceptacles (boîtes en pierre de taille ou coffres) construits peu avant la consécration du monument. En revanche, les offrandes faites lorsque le bâtiment était en activité étaient introduites dans des fosses creusées à la surface et ensuite scellées.

Les offrandes de clôture étaient placées sur des planchers, des escaliers ou des autels, et étaient recouvertes par des tonnes de terre de l’extension ou de la construction de l’édifice.

 

1.   La pensée Mexica

La dualité de la pensée Mexica se résume dans le visage de cette figurine. Sa face gauche est celle d’un personnage vivant ; la droite est celle de Tlaloc, dieu de la pluie, qui vit dans le monde souterrain, aussi monde des morts comme le souligne sa mâchoire décharnée.

Ainsi la figurine résume le cycle vie-mort, la mort générant la vie et la vie générant la mort, et oppose deux conceptions : l’une souterrain de germination et de croissance, l’autre céleste de maturation.

 

 

1.1 La mort : Forces féminines de germination et de croissance

Groupe féminin, associé à l’eau, à la terre, au froid, à la mort, à la faiblesse, à la fétidité, à l’obscurité, au ventre d’une femme enceinte, …

1.2. La vie : Forces masculines de maturation :

Groupe masculin, associé au feu, au ciel, à la chaleur, à la vie, à la force, au parfum, à la lumière, au sperme, …

 

 

2.   Quetzalcóatl, dieu créateur de l’univers et de l’humanité

Mi-oiseau, mi-serpent, Quetzalcóatl (« serpent à plumes ») est né de la fusion des deux pôles opposés de l’univers, souterrain et céleste. Il exprime ainsi les principes fondamentaux de dualité, d’opposition et de complémentarité qui régissent la pensée Mexica.

Franchissant inlassablement les limites spatiales et temporelles de l’univers, il fait circuler les substances entre le monde des dieux et celui des hommes et favorise la succession des jours. Sur cette sculpture, sa tête est ornée d’une natte symbole de pouvoir.

3.   La vision Mexica du monde

Des dieux ont créé l’univers à partir d’un être primordial qu’ils ont divisé en deux pour former le ciel et la terre ; cette dernière repose sur le monde souterrain, et est couverte de la surface terrestre où vivront les hommes et d’autres créatures. Ensuite, ces dieux ont créé le soleil, les humains, leur nourriture, la vie, au prix de leur propre sacrifice. Puis, quatre ères ont précédé le temps présent, les quatre soleils. Détruits successivement par un cataclysme, ils ont laissé la place à notre ère, le Cinquième soleil.

Cette histoire de la création de l’univers ici résumée, met en lumière les constantes fondamentales de la pensée Mexica. Le ciel et le monde souterrain s’opposent mais ne peuvent pas exister l’un sans l’autre. Aussi l’équilibre nécessaire à la vie et à la course du monde repose sur le principe de dualité, d’opposition et de complémentarité. Mais cet équilibre est précaire. Il doit être préservé et revitalisé par les rituels, par la nourriture offerte aux dieux ou de dépôts rituels, et dans le cas extrême, par le sacrifice humain, don fait aux dieux qui eux-mêmes se sont sacrifiés pour créer leur monde.

3.1. Création de l’univers

Dans la vision Mexica, l’univers et ses parties célestes et terrestres, ont été créés à partir du corps de Cipactli, un être légendaire mi-poisson, mi-crocodile, mi-poisson-scie qui évoluait dans les eaux primordiales, quand tout n’était qu’eau et obscurité. Deux dieux ennemis, Quetzalcoatl, dieu créateur et Tezcatlipoca, dieu suprême et dieu du destin, pénétrèrent dans son corps et le divisèrent pour créer la terre et le ciel. Transformés en deux grands serpents, Quetzalcoatl et Tezcatlipoca s’élevèrent alors depuis le centre de la Terre jusqu’aux cieux. Leurs corps enlacés formèrent le grand arbre cosmique qui traverse l’univers. Le corps de Cipactli cherchant à se recomposer, quatre piliers, situés aux extrémités de l’univers, furent nécessaires pour maintenir séparés le ciel et la terre.

 

 

Ensuite, les vieux dieux ordonnèrent que tous les fruits nécessaires à l’humain, sortent de Tlaltecuhtli (moitié terrestre de Cipactli). Tlaltecuhtli accepta et demanda, en contrepartie, à être abreuvé du sang des humains. Depuis, les cheveux de Tlaltecuhtli sont les arbres, les fleurs et les herbes ; sa peau, les herbes plus petites ; son nez, les vallées et les montagnes ; ses yeux, les puits, les sources et les petites grottes ; de sa bouche-caverne sortent les fleuves.

 

3.2. Mictlantecuhtli

Mictlantecuhtli, dieu de la mort, apparaît sous la forme d’un personnage en partie décharné. Sa tête est percée de plusieurs perforations dans lesquelles étaient insérées des mèches de cheveux bouclés, particularité des êtres de l’infra-monde, tout comme les griffes qui tiennent lieu de main.

De ses côtes apparentes, pendent le foie et la vésicule où est situé l’Ihiyoti, « âme » associée aux pouvoirs du monde souterrain.

 

 

3.3. L’univers et ses espaces : Écoumène et Anécoumène

L’univers se compose de trois grands ensembles : le monde céleste, le monde souterrain et la surface terrestre. Suivant le principe de dualité, les qualités des mondes céleste et souterrain s’opposent et se complètent :

  • le monde céleste est chaud, sec, lumineux, fort, supérieur, ardent, diurne, masculin.
  • le monde souterrain – ou infra-monde- est froid, humide, obscur, faible, inférieur, aqueux, nocturne, féminin.

Ce dernier abrite la Montagne sacrée et le Tlacocan, lieu de germination ainsi que Mictlan, région de la mort.

 

Le monde céleste – chaud, sec, lumineux, fort, supérieur, ardent, diurne, masculin – est représenté dans la vision mexica, par l’aigle ou le colibri, de nature guerrière.
C’est le lieu où vont les âmes des guerriers et des femmes mortes en couche, l’accouchement étant associé à la guerre.

 

  • Écoumène : Monde terrestre

Dans l’écoumène, sur notre surface terrestre jusqu’à la voûte céleste, vivent les créatures des dieux de substance dense : astres, météores, hommes, animaux, plantes et objets ; ces créatures cohabitent cependant avec quelques êtres de substance légère.

L’écoumène s’oppose à l’anécoumène

 

  • Anécoumène : Monde céleste, infra-monde, et arbres cosmiques

L’anécoumène englobe le monde céleste, l’infra-monde, les arbres cosmiques, la Montagne sacrée et ses répliques. Dans l’anécoumène, évoluent les êtres de substance légère. (dieux, forces diverses, morts…)

 

 

 

3.4. Les trois âmes :

Chaque être de substance dense a une part de substance légère que nous appellerions « âmes », lui permettant de conserver son équilibre. Cette part de substance légère se situe dans trois parties majeures de l’être humain.

  • Le TONALLI, situé dans la tête, relie l’individu aux forces surnaturelles externes, par exemple au destin.
  • Le TEYOLÍA situé dans le cœur est donné par le dieu patron. Il regroupe les principales fonctions vitales, intellectuelles et affectives. Il se sépare du corps à la mort de l’individu et voyage dans l’au-delà.
  • Le IHIYOTL situé dans le foie, de lui dépend la vigueur physique et une grande partie de ses passions et sentiments

 

 

3.5. Opposition et complémentarité :

Tout être, qu’il soit de substance légère (dieux, forces, morts…) ou de substance dense (humains, animaux, objets, pierres…) porte en lui des qualités opposées et complémentaires calquées sur celles des mondes céleste et souterrain :

  • D’une part, chaud, sec, lumineux, fort, supérieur, ardent, diurne, masculin
  • D’autre part, froid, humide, obscur, faible, inférieur, aqueux, nocturne, féminin.

Ainsi le masculin s’oppose au féminin, le braséro à la jarre qui contient de l’eau, le cerf au serpent, l’oiseau au jaguar, l’or au jade ou au cuivre. Les unes sont associés aux qualités du monde céleste, au soleil à son zénith, les autres aux qualités du monde souterrain et à la fertilité.

 

Jarre / Brasier :

Cette opposition symbolise l’opposition eau-feu, une des plus fortes dans la vision Mexica de l’univers.

 

Jaguar / Aigle :

Le jaguar pour ses habitudes crépusculaires est associé à l’obscurité, au monde souterrain ; l’aigle est associé au soleil, à la guerre, à Huitzlopoochtli.

 

 

 

 

Serpent / Cerf :

Le serpent, associé à la terre, s’oppose au cerf, incarnation du soleil.

 

 

 

Jade / Or :

Les pierres vertes et le jade sont associés à la terre, à l’humidité. L’or est associé au ciel, au soleil et à la guerre.

Cuivre / Or : Le cuivre est associé à la terre, l’or, par sa brillance, est associé au soleil.

 

Obsidienne / Silex :

L’obsidienne, noire été froide, est associée à l’inframonde alors que le siles, pour ses étincelles, est associé au feu.

 

 

 

Tambour / Flûte :

Le tambour (teponaztli), féminin, est associé à l’inframonde ; la flûte, masculine, est associée au ciel.

 

 

4. les trois mondes :  Céleste, Souterrain et Surface terrestre

Ces trois ensembles sont traversés, en leur centre, par l’arbre cosmique, axis mundi qui relie les forces opposées du haut et du bas et qui plonge ses racines dans la Montagne sacrée. Ses quatre répliques, placées aux quatre coins de l’univers, en soutiennent les différentes couches. Cet ensemble cosmique forme l’anécoumène où évoluent les dieux, les morts et les autres forces de substance légère.

A la surface de la terre, dans l’écoumène, vivent les créatures des dieux, qui sont de substance dense : les humains, les animaux, les plantes, les astres, les pierres, les objets.

 

Schéma de l’univers

Ces trois niveaux sont traversés par un axe central, l’axis mundi, et soutenus par quatre piliers situés aux extrémités de l’univers. Répliques de l’axe central, ces piliers sont conçus, comme lui, sous la forme d’arbres cosmiques.

CHICNAUHTOPAN, « les neuf qui sont au-dessus de nous » est le monde céleste. Le monde céleste est le rameau de l’arbre cosmique souvent dominé par l’aigle, symbole du soleil à son zénith.

TLALTIPAC : « Sur la terre », partie intermédiaire entourée par la mer, composée de quatre étages où évoluent les hommes, les animaux, les plantes, les météores, les astres.

CHICNAUHMICTLAN, « les neuf lieux de la mort », correspond à l’infra monde ou monde souterrain. Il est divisé en deux parties, Mictlan et Tialocan. C’est dans ce lieu que le cycle mort-vie prend forme.

 

Mictlan , lieu de la mort, est dominé par Mictlantecuhtli.

Tialocan, source de vie, est conçu comme un grand grenier qui conserve les « graines-cœurs » qui pousseront à la surface de la terre. C’est le règne de Tlaloc, dieu de la pluie, « celui qui fait germer », et de Chalchiuhtlicue, puissante déesse des eaux.

 

LE MINALLI :

Dans le tronc de l’arbre cosmique central, deux courants opposés s’écoulent en spirale.

Le courant ocre et chaud vient des cieux et descend vers le monde souterrain ; l’autre, bleu et froid, suit le chemin inverse. Ces flux, résumés dans un symbole, le Malinalli, génèrent la vie, le mouvement, le temps.

 

L’inframonde et ses représentations.

L’inframonde ou monde souterrain – froid, humide, obscur, faible, inférieur, aqueux, nocturne, féminin- est représenté dans la vision Mexica, entre autres, par le coquillage, le serpent, le crapaud qui appelle la pluie, et le jaguar qui, par son comportement crépusculaire, est associé au soleil nocturne.

 

Il abrite la région des morts, Mictlan, et le Tlalocan, le grand grenier source de vie.

 

Mictlan, région des morts est représenté dans la vision Mexica, par des têtes décharnées ou des os croisés faisant référence aux quatre régions de cet espace.

Les deux bouches de la Montagne sacrée – une supérieure, l’autre inférieure – sont les lieux d’entrée et de sortie des créatures dans leur mouvement cyclique de mort-vie. Les astres, les êtres humains, les animaux, les plantes et les objets, naissent et meurent par ces bouches.

 

 

4. L’AXIS MUNDI, LA MONTAGNE SACRÉE ET L’ARBRE COSMIQUE

À l’intérieur du monde souterrain, l’arbre cosmique central plonge ses racines dans la Montagne sacrée sous laquelle se trouvent les eaux souterraines et la région des morts.

 

 

Les échanges entre humains et dieux. Le temps et l’espace.

En se déplaçant et en agissant dans le monde terrestre des créatures humaines et animales, les dieux se fatiguent et perdent progressivement leurs forces. Pour récupérer et rester en mouvement, ils doivent se nourrir. C’est la raison pour laquelle ils ont créé les êtres humains qui, toute leur vie, doivent les vénérer et les nourrir avec des offrandes et des sacrifices.

Les sources historiques du 16ème siècle indiquent que les fidèles considéraient comme des êtres privilégiés, en raison de leurs relations étroites avec les dieux, et se sentaient redevables envers ces derniers qui les avaient créées et subvenaient à leurs besoins. Leur engagement envers les dieux était tel que le produit de leur travail ne suffisait pas à rembourser ce qu’ils avaient reçu : ils devaient leur donner leur propre sang, et à la fin de leur vie, leur offrir leur dépouille.

Les actuels Nahuas de la Sierra Norte de Puebla du Mexique, héritiers de cette ancienne conception, résument le processus en une seule phrase : « La très sainte Terre Mère nous nourrit, puis elle nous mange »

 

4.1. Les échanges entre les humains et les dieux

Les relations entre les humains et les dieux étaient réciproques. Les humains se considéraient comme les bénéficiaires des faveurs divines, dans leurs tâches quotidiennes et dans tous les moments importants de leur existence : ils recevaient avec gratitude la pluie, la fertilité de la terre, la santé, leur pouvoir de reproduction, le succès et la guerre.

Cependant, les pluies erratiques, les mauvaises récoltes, les maladies et les défaites militaires les incitaient à tenir les dieux pour inconstants, très rigoureux et parfois avares. Les fidèles devaient donc leur faire des offrandes et des sacrifices pour les remercier de leurs dons, les apaiser ou calmer leur colère. Ils les régalaient du parfum des fleurs et de l’encens, de la fumée du tabac et des premiers fruits de la récolte, du sang et de la chair qui les ravivaient.

Les humains respectaient ainsi un échange éternel, empêchant l’interruption des cycles, l’arrêt de la course du soleil, et permettant l’écoulement du temps, la succession de la vie et de la mort.

 

4.2. Le temps et l’espace

Les fidèles célébraient toutes sortes de cérémonies magiques et religieuses dans le but d’approcher les divinités et de bénéficier de leurs faveurs. Ces cérémonies devaient se dérouler à des moments et dans des lieux définis avec une grande précision par la liturgie.

D’une part, il fallait accomplir les rituels à un moment qui coïncidait avec la manifestation des dieux sur la surface terrestre. Leur influence étant régie par des cycles, la gestion du calendrier agricole de 365 jours et du calendrier divinatoire de 260 jours était cruciale. D’autre part, les rituels devaient être accomplis dans des espaces sacrés, généralement des zones proches des « au-delà ».

En d’autres termes, pratiquer un rituel supposait de choisir les bonnes conditions, pour établir un échange mutuel propice. Il s’agissait de faire coïncider le profane et le sacré.

 

5. L’espace des offrandes

5.1. Les effigies divines :

Des images de dieux étaient placées dans les maisons, dans les temples, sur les places à la croisée des chemins, à l’intérieur des grottes, sur les rochers, autour des sources d’eau et dans tout autre lieu de la géographie sacrée où les fidèles s’adressaient aux divinités par des offrandes, des prières, des chants et des processions. Souvent sculptées dans de la pierre ou du  bois, elles pouvaient également être façonnées en céramique ou modelées dans de la terre ou dans une pâte d’amarante ( plante herbacée).

Les Mexicas voyaient dans chaque figure des dieux, un ixiptia, une « peau », une « coquille » du divin, c’est-à-dire un réceptacle des influences, des vertus et des forces que les divinités y insufflaient pour le bien de leurs protégés. Sa nature d’ixiptia découlait de ses ressemblances avec le dieu qui l’habitait et lui donnait vie.

Les sculptures étaient souvent pourvues d’un « cœur » qui animait la matière, sous la forme d’une pierre semi-précieuse placée dans une cavité aménagée au niveau de la poitrine. Une fois la sculpture achevée et activée, rares étaient ceux qui osaient soutenir l’éclat de ses yeux d’obsidienne ou de pyrite.

En règle générale, les offrandes étaient déposées aux seuils entre le monde des créatures (écoumène) et les « au-delà »exclusifs (anécoumène).

Les zones les plus fréquemment utilisées étaient les divers lieux et éléments de la géographie sacrée (collines, grottes, ravins, sources, tourbillons d’eau, arbres feuillus, fourmilières), les principaux éléments d’organisation  de l’espace urbain ( avenues, places, aqueducs), les édifices religieux les plus importants (temples pyramidaux, oratoires, terrains de jeu de balle), les monuments sculpturaux ( figures de culte, tables rituelles) et les habitations ( palais, résidences urbaines, maisons paysannes et leurs champs de culture).

Là, les fidèles pouvaient engager une communication et un échange privilégiés avec les entités divines par le biais d’invocations, de prières, d’oraisons et de riches cadeaux.

5.2 La nature des dieux :

Les innombrables dieux du panthéon Mexica, invisibles en général, peuvent se manifester dans les rêves, à travers les objets, les plantes et les animaux, ou en prenant possession du corps des individus lors des cérémonies rituelles. Leur personnalité est proche de celle des êtres humains : ils éprouvent des sentiments tels que l’amour, l’inimitié, l’orgueil, et peuvent faire preuve de bonté, de générosité ou de cruauté.

Aussi, la relation complexe et constante entre les humains et les dieux est fondée sur l’engagement, la négociation et la réciprocité. La bienveillance ou la malveillance de dieux dépendent du comportement humain,  des rituels, des offrandes, des prières, des chants et des danses qui leur sont consacrés.

Une caractéristique notable des dieux du panthéon Mexica est leur dédoublement en plusieurs êtres divins : physiquement très différents, ces derniers partagent cependant des attributs, généralement visibles sur les sculptures, qui les assimilent à une même divinité. Les dieux peuvent également  se fusionner en une seule divinité.

 

5.3. Les dons : instruments et mobiliers pour offrandes.

Les Mexicas disposaient d’une grande variété d’instruments et de mobiliers liturgiques. Dans les peintures et les sculptures, les prêtres sont représentés tenant un brûle-parfum en céramique et un sac en coton dans lequel ils transportaient la résine aromatique connue sous le nom de copalli.

Souvent, ils avaient aussi des ustensiles de mortification avec lesquels ils s’auto-prélevaient du sang : poinçons en os, épines d’agave ou lames d’obsidienne. Ils portaient sur le dos, accroché au cou, un récipient en forme de calebasse contenant du tabac en poudre mélangé à de la chaux ou de la cendre, qui était mâché pour ses vertus énergisantes et stupéfiantes.

A ces objets de base, s’ajoutent ceux qui étaient utilisés lors de cérémonies spécifiques, comme les trompettes en coquillage, les cordes, les orties et les couteaux en silex qui servaient pour le sacrifice humain et animal. S’y additionnent les blocs et les tables de sacrifice en pierre, ainsi que les récipients destinés à l’offrande du sang et des cœurs des victimes.

 

5.4 Brasiers, encensoirs et copal.

 

L’encensement consistait à imprégner de fumée de copal (encens) les lieux sacrés, les figures divines et les participants aux cérémonies. L’objectif était d’invoquer les êtres surnaturels pour obtenir leurs faveurs, de sanctifier les lieux de rituels, de purifier les personnes et même de faire des prédictions.

Dans les habitations, les volutes de copal étaient utilisées pour bénir les coins et les seuils de bâtiments, les outils de travail et les objets artisanaux.

Le tlenamaquiliztli  ou « offrande du feu » consistait à diriger le brûle-parfum et ses effluves vers chacun des quatre points cardinaux.

 

 

 

4.6 Les pierres sacrificielles :

Les pierres sacrificielles peuvent prendre la forme de techcatl (cône tronqué, cylindre, polyèdre), temamacatl (anneau) ou de chacmool (personnage allongé). Il s’agit de bases solides placées devant les chapelles ou au centre de plateformes basses, souvent encastrées dans le sol pour plus de stabilité.

 

Le dos de la victime était plaqué contre ces pierres, de façon que son corps soit arqué. Quatre prêtres maintenaient fermement ses membres, tandis que le cinquième pratiquait une incision dans l’abdomen à l’aide d’un couteau en silex, puis coupait le diaphragme et pénétrait ainsi dans la cage thoracique pour en extraire le cœur.

 

5.7 Instruments pour le sacrifice

Les couteaux en silex étaient les instruments par excellence pour le sacrifice animal et humain, en particulier pour l’extraction du cœur. Bien que leurs bords ne soient pas  aussi tranchants que ceux des outils en obsidienne, ils offrent une dureté et une résistance idéales pour les mouvements brusques propres aux exécutions rituelles.

Dans de nombreux cas, il est clair que les couteaux enterrés dans les offrandes n’étaient pas utilisés comme des instruments fonctionnels, mais comme des figures divines : ils portent toutes sortes de coiffes, de visages, d’ornements, d’insignes et d’armes peints sur eux ou façonnés avec des appliques.

 

5.8 Récipients pour le sang et les coeurs

 

                                          …

One Comment

  1. Jacline MORICEAU 16 juin 2024 at 13 h 10 min

    Toujours passionnant et inattendu
    Amitiés
    Jacline

Leave A Comment

%d blogueurs aiment cette page :