//Ludger Schwarte La futurité

Ludger Schwarte La futurité

By | 2024-09-30T22:01:29+02:00 27 septembre 2024|Art|2 Comments

Thème du tiers  inclus: La futurité, l’autonomisation artistique, la puissance anarchique de l’avenir

Antagonismes en interaction:  Présent  ~  Futur;  Art moderne ~ Art contemporain, Art contemporain ~ Art futur.

*

Entre présent et avenir

 

Selon le postulat fondamental de la logique du tiers inclus contradictoire, il découle une suite de degrés entre actualisations et potentialisations d’antagonismes en interaction (dans le cas présent, le présent et le futur).

La dynamique qui en émane est dite transfinie, ces multiples degrés constituant une suite de valeurs relatives et discontinues. Cette discontinuité est transfinie car ne peut s’immobiliser dans le fini.

Ce qui est vrai des antagonismes l’est également pour le tiers inclus, s’agissant d’un état où les évènements dynamiques sont contradictoires.

L’art du futur (et donc le concept de « futurité » ) se conçoit en rupture dans l’écoulement du temps. Il  considère que si  l’avenir se pense à partir du donné, rien ne pourra réellement advenir, qu’il sera impossible de rendre compte de « l’initialité » du futur et de sa discontinuité radicale. L’art  du futur pense la césure avec son propre temps. Autonomisation anarchique de l’avenir, l’art de la futurité  fixe le présent en finitude, absolutise le futur en excluant tout lien avec le présent ou le passé.

Si tel est le cas, la dynamique qui émane du dialogue entre passé et futur, porteuse de contradiction entre éléments, évènements ou phénomènes antagonistes leur appartenant, rend le concept de « futurité »  incompatible avec les termes de la logique du tiers inclus contradictoire.

 

Ludger Schwarte

La futurité

 

 

 

Ludger Schwarte est professeur de philosophie à la Kunstakademie de Düsseldorf. Il a publié de nombreux ouvrages sur la philosophie de l’architecture, la philosophie politique, la théorie  de l’image, l’histoire des sciences et l’esthétique.

 

 

L’art moderne a cédé sa place à l’art contemporain.

Dans ce passage, il n’en va pas simplement d’un changement d’époque,

mais d’une mise à l’épreuve de ce que le mot art peut bien vouloir dire,

et notamment d’une transformation radicale de sa fonction sociale

 

 

 

Impossible de parler de l’art contemporain

sans s’interroger sur ce qui soutient son système,

ce qui conditionne son engagement, ses orientations

et ce qui génère ses effets.

 

 

Cette tendance qu’a l’art contemporain de s’occuper avant tout de lui-même

lui a valu le reproche d’être complaisant et auto-référentiel.

 

Le temps est venu de réinventer la façon de concevoir l’art,

cela passe d’abord par une prise en considération du sens de la « contemporanéité ».

 

 

Sortir l’art de ses impasses, et notamment de la « contemporanéité »,

c’est lui frayer de nouvelles voies vers le futur.

 

L’art contemporain s’est installé dans un temps

qui ne peut envisager le futur

que sur le mode du ressouvenir, de la répétition et de la différenciation.

 

Il s’agit  donc d’inaugurer d’autres horizons du possible.

 

 

Aussi longtemps que l’avenir se pense à partir du donné

rien ne pourra réellement advenir

impossible de rendre compte de « l’initialité » du futur et de sa discontinuité radicale.

 

Penser l’art qui vient,

c’est penser les façons dont celui-ci constitue une césure avec son propre temps,

et donc penser un art de la futurité.

 

 

La futurité tente d’opposer la restriction de l’art contemporain à la critique du présent

au nom de la perte de la vulnérabilité et du soi.

 

 

Une autre logique du futur

 

 

Incertitude et imprévisibilité de l’avenir:

Futurité

Point de référence de l’autonomisation artistique

 

 

La futurité serait cet aspect des œuvres d’art visant au pur possible,

l’inouï qui soustrait le terrain à toute technique de pronostic,

de conjecture, de développement et d’anticipation.

 

L’art futur se caractérise par futurité,

en tant que fondement d’un libre du devenir.

 

 

 

Ce que l’on demande à l’art par rapport à d’autres formes de pratique esthétique

n’est pas seulement de démontrer sa contemporanéité

en donnant une lecture alternative du temps présent

mais aussi et surtout de s’ouvrir vers l’avenir

 

 

L’art surprend, présente des commencements et s’engage

dans une recherche de nouveauté dans quoi les traces commencent à émerger.

 

La division contemporaine du présent avec ce qui est encore indéterminé, illusoire ou latent

est certes une étape importante à la fois auto-réflexive et ouverte

mais doit être complétée par une possibilité

qui n’est pas déjà inhérente au présent.

 

 

L’art crée ici l’ouverture vers un futur qui ne peut être déduit du passé.

L’art du futur comprend le présent avec un seul temps possible : le futur.

Alors que l’art contemporain s’est intéressé à la production et la reproduction des éléments,

l’art du futur se consacre

aux conditions préalables, aux possibilités, et aux formes d’apparition des éléments.

 

 

 

 

La futurité est ce qui ne peut être programmé car elle déjoue toute prévision, et tout sentiment d’exhaustivité. Le futur n’est pas ce qui est devant nous et s’approche de nous, que ce soit la mort de Heidegger, ou l’avenir de Levinas, il ne peut être anticipé, la futurité survient exactement dans la direction où l’on ne l’attend pas, faute de quoi le futur ne pourrait nous surprendre.

 

 

La futurité est l’arrière-plan de tout évènement

 

Elle est rupture dans l’écoulement du temps

 

Elle subvertit la prédétermination des possibles

ainsi que les répétitions variées et différenciées de ses sous-ensembles et privations

 

En tant que telle, elle fait place à la spontanéité

 

 

Sans cette notion d’avenir ouvert, il n’est pas possible de concevoir une action libre.

 

 

Si la fonction de l’art contemporain consiste à affirmer

l’interminabilité du passé et l’insurmontabilité du présent,

il appartient à l’art du futur

de protéger ou de rétablir la puissance anarchique de l’avenir.

 

 

Ne sommes-nous pas reconnaissants à des œuvres d’art

qui sont dans leur création originale,

nous surprennent et agissent par leurs structures temporelles ouvertes à l’écologie

sur ce qui ne peut être programmé.

 

 

                                   Ludger Schwarte

 

                                         …

2 Comments

  1. Joseph Brenner 3 octobre 2024 at 11 h 34 min

    Excusez du peu, mais les arguments qui dépendent d’un soi-disant rupture complète me laissent froid, qu’ils soient de Lupasco ou de Schwarte.

    Joseph B.

  2. Temple 5 octobre 2024 at 12 h 01 min

    Vous dites : « Si tel est le cas, la dynamique qui émane du dialogue entre passé et futur, porteuse de contradiction entre éléments, évènements ou phénomènes antagonistes leur appartenant, rend le concept de « futurité » incompatible avec les termes de la logique du tiers inclus contradictoire.»
    Un évènement contradictoire (l’art, par exemple) peut se développer par une actualisation d’homogénéisation (le continu dans l’art), de différenciation,(le discontinu,) ou de façon contradictoire. Il semble que la futurité pourrait s’inscrire dans cette dialectique hétérogénéisante, mais la différenciation en question, pour Lupasco, ne peut être absolue, en raison du principe d’antagonisme qui exclut toute non-contradiction absolue. Répétons le : la logique dynamique du contradictoire exclut l’absolu de la non-contradiction qu’elle soit de l’homogénéisation ou de l’hétérogénéisation et même l’absolu du contradictoire en soi sous peine de nier la création. Vous avez donc bien raison de dire (et de souligner !) que la théorie de Schwarte est incompatible avec la logique dynamique du contradictoire de Lupasco. Cependant, Joseph b s’avance beaucoup, me semble-t-il, en imaginant que Lupasco soutiendrait le point de vue de la rupture absolue préconisé par Schwartz puisqu’il dit son contraire dès l’énoncé du principe d’antagonisme qui fonde sa logique.

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